Collapsologie & psychohistoire
Attention, ceci est officiellement la BD la plus longue jamais publiée sur ce blog. Elle n’est pas forcément très drôle, mais je pense qu’elle a son importance. En tout cas, c’était quelque chose dont je voulais parler depuis pas mal de temps. C’est parti !
Collapsologie & psychohistoire
💡 Parlons d'effondrement. Pour qu'on comprenne bien le sens que je donne ici à ce mot, je peux vous résumer le concept ainsi :
C'est donc d'effondrement imminent de civilisation que nous parlons, de la civilisation industrielle en l'occurrence.
Pour faire simple, l'humanité fait face – ou va faire face de manière imminente (quelques années, quelques décennies au mieux) – à plusieurs crises majeures.
Le déréglement climatique.
L'épuisement des énergies fossiles.
✷ Et du charbon, et de l'uranium, etc.
L'épuisement des matières premières.
L'extinction massive des espèces.
✷ Voir l'article « Citations apocryphes ».
✷✷ Gee recycle aussi ses blagues pour le bien de la planète.
La crise financière.
Chacune de ces crises prises indépendamment pourrait provoquer un effondrement de civilisation.
⚠️ Là, elles sont interdépendantes façon spaghetti (ou domino, selon la métaphore que vous préférez) et nous nous les prenons toutes à la fois dans la figure.
▶️ La principale réaction face à cet état de fait est le déni.
Même lorsqu'un Ministre de l'Environnement
(dont nous préserverons l'anonymat par respect pour l'environnement)
profite de sa démission brutale pour évoquer assez clairement la perspective d'une catastrophe globale…
…tous les mécanismes de déni généralisé (comme se focaliser sur un détail futile pour oublier l'important) se mettent en place.
⚠️ À côté de ça, aucun des pouvoirs nationaux ou internationaux ne prend le chemin d'un changement de société (abandon de la croissance, réduction drastique de l'activité humaine, organisation du partage des ressources, etc.).
Il faut dire que le problème a de quoi rendre fou tant ce chemin est parfaitement incompatible avec le fonctionnement économique actuel.
▶️ Si on prend des mesures concrètes pour limiter la catastrophe et s'y préparer, la société se casse la gueule dans la minute : si on ne le fait pas, elle finira quand même par se casser la gueule, mais en plongeant de plus haut et donc plus violemment.
La question n'est donc plus de savoir « si » le capitalisme (qui est le mode de fonctionnement des sociétés industrialisées) va se casser la gueule, mais « quand ».
💡 Cette BD est synthétique et assez simplifiée : pour approfondir le sujet, je ne saurais trop vous conseiller d'aller lire « Comment tout peut s'effondrer » de Pablo Servigne et Raphaël Stevens. Un bouquin facile d'accès et qui pose le problème de manière détaillée et sourcée.
En fait, non, j'exagère.
Le constat du livre est implacable et pas simple à avaler, et pourtant il porte aussi une sorte d'espoir : les choses VONT changer. Enfin !
Les doux rêveurs écologistes/altermondialistes (j'en suis) ont essayé de les changer « de gré » : la conjonction des crises systémiques le fera « de force ».
▶️ Le boulot de cette nouvelle discipline que l'on appelle la collapsologie (de « collapse », « s'effondrer ») consiste non seulement à analyser les causes de l'effondrement, tenter d'en prévoir les effets concrets sur les populations humaines… mais aussi imaginer un après, car construire un autre monde (que nous espérons meilleur) sera non seulement enfin possible, mais carrément impératif !
Que ferons-nous quand la société industrielle se sera effondrée ?
Ce qui est porteur d'espoir, c'est que pas mal de gens (conscients ou non de la catastrophe qui vient) cherchent déjà des alternatives. Il n'y a qu'à voir la multiplication des initiatives comme Alternatiba, les jardins partagés, les initiatives pour relocaliser l'économie, AMAP, etc.
⚠️ Ce n'est rien à l'échelle de l'économie mondialisée sur le point de craquer, mais je suis persuadé que ce seront par la suite des initiatives capitales pour ne pas sombrer dans le chaos.
Et c'est en cela que les mouvements autour du logiciel libre et des communs (comme Framasoft dont je fais partie) sont aussi importants : pas tant pour le « logiciel » – qui n'existera peut-être plus dans un futur proche – que pour le « libre » !
▶️ Les « qualités » valorisées par le capitalisme (esprit de compétition, réalisation individuelle, « que le meilleur gagne ») seront inutiles et même contre-productives dans une société post-effondrement ou la recherche de l'abondance sera définitivement enterrée. Celles du partage, de l'entraide, de la collaboration, de la contribution, seront vitales !
D'une certaine manière, la collapsologie me rappelle pas mal la psychohistoire, science fictive développée par Isaac Asimov dans sa série de livres Fondation.
⚠️ Certes, la psychohistoire était capable de prédire l'avenir global de l'humanité (et donc de l'influencer), quand la collapsologie ne fait qu'étudier les conséquences catastrophiques d'un modèle de société insoutenable et ainsi tenter de s'y préparer.
Mais les deux se rejoignent sur pas mal de points. Tout d'abord, la situation initiale de Fondation rappelle beaucoup la nôtre.
✷ Citation originale de Fondation, d'Isaac Asimov.
Les conséquences dramatiques décrites – et le déni qui les accompagne – rejoignent pas mal les nôtres.
Et le but de la psychohistoire ressemble à s'y méprendre à celui de la collapsologie.
💡 Affronter l'effondrement ne se fera pas sans des récits, des histoires, un imaginaire pour continuer à rêver, à espérer un mieux même dans la tempête.
Et même si nous devons faire le deuil de nos ambitions spatiales – non, nous ne coloniserons pas la galaxie –, Fondation est déjà, en quelque sorte, un conte de l'effondrement de civilisation à grande échelle.
Nous n'avons pas de psychohistoire, mais il est urgent de semer des graines pour préparer l'après, dans les esprits et dans les actes, pour éviter des décennies de chaos. Pour ne pas se retrouver les bras ballants quand la question ne sera plus uniquement théorique :
Que ferons-nous quand la société industrielle se sera effondrée ?
🛈 Si vous avez aimé cet article, vous pouvez le retrouver dans le livre Grise Bouille, Tome IV.