Dessiner un personnage de Grise Bouille
Je dessine depuis que je suis tout petit, mais j'ai adopté le style de personnages que vous connaissez lorsque j'ai créé mon premier blog, le Geektionnerd, en avril 2009. Ce n'est pas le seul style que j'utilise (je fais des dessins plus complets pour Superflu, notamment), mais c'est un peu ma marque de fabrique.
L'idée, lorsque je l'ai créé à l'époque, c'était d'avoir un style qui me permette de dessiner des choses très rapidement (le Geektionnerd, c'était l'ambition de publier un article par jour) tout en étant immédiatement identifiable. Je me suis très vite tourné vers un style minimaliste et centré sur les personnages (je ne suis vraiment pas passionné par les décors).
Bien sûr, les personnages ont pas mal évolué, notamment pendant les premières années, avant de se stabiliser vers leur design actuel.
En plus de 13 ans, j'en ai littéralement dessiné des milliers. J'allais dire « des centaines », mais en comptant les plus de 400 BD de Grise Bouille (parfois très longues) et les 1500 articles du Geektionnerd, on a clairement atteint les 4 chiffres. Oui, parce que je ne réutilise qu'assez rarement des dessins (je redessine à chaque fois les personnages, même si c'est la même pose ou la même expression).
Il existe deux variantes principales : le design homme, avec son menton et son nez qui constituent la forme du visage, et le design femme, avec un visage rond et un nez plus classique au milieu. J'ai aussi une petite variante spécifiquement dédiée aux hommes/femmes politiques, pour lesquels j'utilise une version vectorielle stylisée de leurs vrais visages, façon South Park.
En dehors de cela, la plupart des personnages ne diffèrent que par leur coiffure (n'ayant pas vraiment de « vêtements » visibles, sauf quand cela est nécessaire à ce que je raconte).
Bref, je vais vous expliquer point par point comment je dessine un de ces personnages, dans l'ordre (qui n'est pas forcément hyper intuitif).
On commence par le menton et le nez
C'est un peu le point distinctif de mon design (surtout pour la version homme), c'est donc toujours par là que je commence. Ce sont deux courbes assez similaires, l'une en dessous de l'autre, constituant le nez et le menton (celle du nez étant un peu plus haute car elle comprend également le front) :
J'essaie de les tracer rapidement, pour qu'elles aient un aspect vraiment lisse et sans tremblement. Il n'est pas rare que je m'y reprenne à plusieurs fois d'ailleurs (si vous avez déjà regardé un de mes streams, vous voyez sans doute ce que je veux dire).
Pour la version femme, c'est une courbe unique beaucoup plus arrondie, qui va théoriquement du haut du front au bas de l'oreille (même si je ne dessine quasiment jamais les oreilles, encore une fois sauf si c'est nécessaire pour un dessin). En général, j'ajoute plutôt le nez après les yeux, mais pour que ce tuto reste cohérent, mettons-le directement. Le nez, c'est souvent une simple pointe en deux traits, mais il peut m'arriver de faire des nez plus ou moins gros :
Les yeux, expression et regards
C'est sans doute l'élément le plus important pour représenter l'émotion / l'état d'esprit du personnage. J'en ai tout un tas de variantes, dont voici les principales :
Notez qu'encore une fois, dans un souci minimaliste, l'intégralité des yeux n'est pas toujours dessinée : ainsi, si je dessine souvent la forme des globes oculaires et les sourcils, la variante « neutre » se limite aux pupilles, soit deux ovales verticaux, un peu à la manière de Spirou.
Je disais que c'était l'élément le plus important pour le côté émotion, mais aussi pour l'interaction du personnage avec les autres. Un truc que je trouve intéressant, c'est que l'être humain a une finesse incroyable pour détecter l'orientation d'un regard humain (on peut savoir si quelqu'un nous regarde même de très loin), et que cette finesse semble s'appliquer aussi à des personnages aussi minimalistes que les miens.
Ainsi, il suffit de bouger ou d'incliner relativement légèrement les pupilles pour que la direction du regard semble changer. C'est fou, non ?
Et c'est aussi vrai pour les émotions d'ailleurs : une variation très légère d'inclinaison des sourcils peut pas mal changer ce que dégage un personnage.
La bouche
Le second élément important pour les expressions (qui marche souvent de concert avec les yeux, j'en recause juste après), la bouche a aussi pas mal de variantes :
Dans la grande majorité des dialogues, les personnages ont juste la bouche ouverte en « O », même si la forme du « O » varie selon le ton du dialogue.
Notez que la combinaison d'une certaine variante d'yeux et d'une certaine variante de bouche peuvent donner des expressions totalement différentes :
La pose, les bras
Bon, il faut être honnête, pour moi la partie centrale de mes personnages est leurs visages, ce qui explique que je commence par là et que ces visages prennent un bon tiers de leurs proportions. Mais n'empêche qu'il leur faut un corps !
Là, on reste encore une fois dans le minimalisme : le torse est réduit à son minimum (un trait droit pour les hommes, une forme de poitrine pour les femmes — oui je sais, c'est une représentation des genres assez restreinte, c'est les limites du minimalisme). Le plus important ici est les bras, pour lesquels, j'ai l'impression de me répéter, j'ai des variantes usuelles :
Les personnages ont quatre doigts comme dans pas mal de BD au style cartoonesque. J'utilise très régulièrement la seconde variante comme position neutre. Je pense que cette pose, avec la main en arrière, me vient de Kid Paddle :
D'ailleurs, en y regardant bien, les proportions de mes personnages sont assez similaires à celles des personnages Kid Paddle, c'est une BD qui a dû me marquer particulièrement !
Les pieds
Enfin, le dernier élément : les pieds. Là, j'avoue que j'ai fait très (trop ?) simple, ce sont bêtement deux ovales horizontaux ouverts au niveau des mollets. On m'a déjà fait remarquer plusieurs fois que ça donnait à certains personnages un air de zizi (notamment les chauves), mais ce n'était clairement pas l'intention de départ :D
Les personnages n'ont donc pas vraiment de jambes, ce qui n'est pas toujours simple à gérer quand je veux les faire marcher ou courir : dans ce cas, je leur invente des genoux.
Personnalisation et accessoires
Il peut m'arriver d'adapter très légèrement la physionomie des personnages (un trait du torse plus bombé pour indiquer quelqu'un avec du ventre par exemple), mais en général, leur unique point de différenciation est la coiffure et les éventuels accessoires (lunettes, cravate, barbe, etc.).
Je présente ça en dernier car c'est la seule partie qui est spécifique à certains personnages, mais bien sûr, en général je dessine ça juste après avoir dessiné le reste du visage (ou les lunettes en même temps que les yeux, etc.).
Je termine donc par une petite animation qui montre un auto-portrait (oui, si on peut dire) en temps réel sur Inkscape :
J'espère que ce petit « tutoriel » vous a plu. Vous pouvez maintenant essayer de faire de même ! Et si vous n'y arrivez pas ou si vous ne voulez pas vous embêter, vous pouvez retrouver les sources vectorielles de Grise Bouille sur son dépôt Git.
Enfin, pour aller au plus simple, notez qu'il existe toujours GéGé, le Générateur de Grise Bouille (ex-Générateur de Geektionnerd) qui vous permet de créer vos propres BD avec une sélection de mes dessins !