Sandrine et ses pantoufles

Publié le 12 octobre 2022 par Gee dans Comic trip
Inclus dans le livre Grise Bouille, Tome VI

Ça faisait longtemps qu'on avait pas fait une petite incursion dans la culture populaire, alors voilà. J'ai hésité à taguer cette histoire GBBU parce que c'est un peu dans le ton, mais finalement ça reste relativement distinct.

Sandrine et ses pantoufles

📜 Il était une fois, à la médecine du travail des contes merveilleux…

À l'accueil, une dame demande : « Personne suivante.  Nom, prénom, occupation ? » Une femme coiffée d'un chignon arrive avec des béquilles et les deux pieds dans le plâtre : « Ion, Sandrine.  Femme de ménage. » La dame de l'accueil : « Et qu'est-ce qu'il vous arrive ? »

Sandrine montre ses pieds : « Il m'arrive qu'un petit malin s'est mis en tête de me faire porter des pantoufles de verre, et que j'me suis niqué les pieds ! » L'hôtesse : « Ah. “Niqué”.  Je note. » Sandrine : « C'est-à-dire que c'est fragile, le verre : j'ai fait trois pas, et CRAC, le talon a traversé. » L'hôtesse : « “Crac”, vous dites. Avec un “K” à la fin ou pas ? »

L'hôtesse : « Attendez un instant… » Elle parle au téléphone : « Oui, est-ce que vous pourriez m'envoyer Jean-Michel du service juridique ? J'ai une Sandrine Ion qui a un problème de pantoufle. Merci. » Sandrine : « Un problème de bouts de verre dans les panards, surtout. »

Un homme arrive et tend la main à Sandrine : « Mlle Ion ? Sandrine Ion ? » Sandrine : « Elle-même. » L'homme : « Jean-Michel Wikipédia, enchanté. J'ai appris que vous aviez un petit souci de pantoufle ? » Sandrine : « J'ai les fumerons amochés. Rapport au fait que les pantoufles étaient en verre.  Tu parles d'une idée d'abruti. »

Jean-Michel : « Eh bien j'ai votre contrat sous les yeux, qui stipule des pantoufles de “vair”, V.A.I.R, et non de “verre”, V.E.R.R.E. » Sandrine : « De vair ? Qu'est-ce que c'est que cette couillonnade ? »

Jean-Michel, en mode « définition » : « Le petit-gris est le nom vernaculaire donné à plusieurs espèces d'écureuils et, par extension, la fourrure de ces écureuils qui donnent le petit-gris, un assemblage de dos gris, et le vair (gros-vair et menu-vair), alternance de dos gris et de ventres blancs. C'était autrefois une parure vestimentaire réservée aux classes sociales les plus élevées. » Sandrine : « Non mais j'ai une gueule à me chausser avec des écureuils ? »

Jean-Michel : « J'ajoute que le terme « pantoufle » ne désigne pas une chaussure à talon comme vous en avez porté. » Puis, toujours en mode « définition » : « La pantoufle est un chausson d'intérieur, sans tige et parfois sans talon, en matière légère et flexible (cuir, velours, laine foulée ou feutre, etc.). » Il ajoute : « Donc même si vous l'aviez prise en “verre”, V.E.R.R.E, vous ne vous seriez pas blessée avec une simple pantoufle… »

Sandrine : « Sérieusement ? Vous me voyez aller danser au bal du Prince Électron en charentaises ? » Jean-Michel : « Le Prince Électron ? » Sandrine : « Ouais, c'est mon crush, ça fait des plombes qu'il me gravite autour.  C'est électrique, entre nous, pour ainsi dire. »

Une autre femme arrive, en colère : « Bon, c'est bientôt mon tour ? Ça fait des plombes que j'attends ! » Jean-Michel : « Euuuh, oui, mademoiselle ? » La femme : « Stasi. Anna Stasi. » Sandrine : « Oh tiens, la belle-frangine !  Ça biche ? »

Anna : « Je viens de voir dans mon contrat que j'étais censée me mutiler le pied pour le faire rentrer dans la pantoufle de verre de l'autre glandu de prince, là ? » Jean-Michel : « Euuuuh… » Sandrine : « T'esquinte pas, belle-frang', elle est flinguée, la pompe.  En plus c'était pas du verre, c'était de l'écureuil. »

Jean-Michel : « Eh bien, votre patron, M. Grimm, est assez radical dans sa vision du conte.  C'est bloquant, pour vous ? » Anna, agitant une scie : « Bah c'est-à-dire que j'avais signé pour un conte merveilleux, pas pour un remake de Saw. » Sandrine : « C'est clair, ça va finir par devenir malsain, ces vieux libidineux avec leurs fétiches des arpions. »

Anna : « Pi moi j'dis : si le Prince Életruc n'est pas foutu de reconnaître la frangine autrement que par sa pointure, c'est pas une femme qu'il lui faut.  C'est des culs-de-bouteille. » Sandrine : « Non mais c'est l'alcool, ça, faut pas s'inquiéter.  Il est toujours un peu chargé.  Faut pas voir ça négativement. »

Jean-Michel : « Mmh, au passage, je note ici que selon M. Grimm, Mlle Ion devrait être appelée “Aschenputtel”. » Sandrine, vénère : « De quoi il m'a traitée, là, Jean-Michel Encarta ? » Anna : « Dis donc, il va rester poli, le tâcheron. »

Jean-Michel : « Mais non mais c'est juste le nom de… » Sandrine et Anna s'en vont. Sandrine : « Ouais ouais ouais !  J'aime pas beaucoup ça ! » Anna : « Vous entendrez parler de nous ! Ça se réglera aux prud'ogres ! »

Jean-Michel reste seul, l'air effaré.

Un gamin arrive en titubant, il a les yeux écarcillés comme s'il avait pris de la coke : « Bonjour. C'est ici les urgences ? Je m'appelle Jack et je me sens bizarre.  J'crois qu'on a glissé un truc chelou dans mes haricots. » Jean-Michel le regarde d'un air blasé. Note : BD sous licence CC BY SA (grisebouille.net), dessinée le 11 octobre 2022 par Gee.

Publié le 12 octobre 2022 par Gee dans Comic trip

🛈 Si vous avez aimé cet article, vous pouvez le retrouver dans le livre Grise Bouille, Tome VI.

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