LHDG01. Pop-ups et fenêtres modales
Préambule : j'ai le plaisir, cette année, de rejoindre l'équipe de Libre à vous !, l'émission de radio de l'April, diffusée en région parisienne sur la radio Cause Commune (93.1 fm) et sur Internet dans le reste du monde. J'y ferai une chronique humoristique mensuelle intitulée Les humeurs de Gee : voici la toute première, donnée mardi dernier !
Un grand merci à l'équipe de l'April pour l'accueil, l'enregistrement, et tout le boulot d'édition des podcasts ! Vous pouvez aussi retrouver le reste de l'émission en ligne.
Note : cette chronique est en partie basée sur ma BD Ne partez si vite ! (oui, je m'autorecycle, c'est mon côté écolo).
Texte de la chronique
Salut à toi, public de Libre à Vous,
Pour cette première chronique, j'ai décidé de te parler de pop-ups, d'overlays et de fenêtre modales sur le web. Pour les néophytes, en gros, ce sont tous les petits trucs qu'on nous colle devant nos sites web, en général sans qu'on ait rien demandé.
Alors, je suis pas à proprement parler un vieux de la vieille, mais j'ai quand même découvert le web au moment où il commençait à se démocratiser en France, aux alentours de l'an 2000. Et à cette époque, on subissait souvent une salle bestiole aujourd'hui heureusement disparue : la pop-up. Je sais, je vous parle d'un temps que les moins de 20 ans, etc. etc.
Donc, pour les moins de 20 ans, je précise : la pop-up était une petite fenêtre qui s'ouvrait en plus de la fenêtre du navigateur quand tu cliquais sur certains liens. En général, avec de la pub dedans. C'était assez désagréable, on passait notre temps à fermer des fenêtres intempestives et on a assez vite inventé des bloqueurs de pop-ups pour faire ça automatiquement.
Sauf que bien sûr, ça a marqué le début de la course à l'armement entre pubards et antipubs. Très vite, les pubs ont été intégrées aux pages web, parfois dans des proportions un poil exagérées : la palme dans le genre revenait sans doute à Lycos – oui, je sais, ça nous rajeunit pas – Lycos, donc, qui, après avoir racheté les pages persos Multimania en janvier 2001, les a méthodiquement pourries avec tellement de pubs superposées qu'on finissait par chercher les 3 pixels de contenu qui dépassaient derrière les quinze surcouches de pubs. Et de la pub de qualité hein, du GIF animé strass et paillettes, voire même de la bonne vieille animation Flash bien lourdingue comme on n'en fait plus. Ce qui n'est sans doute pas plus mal.
Mais comme un juste retour de karma, Lycos a depuis fini dans la vaste poubelle du web, non sans avoir également flingué Caramail auparavant, mais c'est une autre histoire.
Bref. La pub intégrée aux pages n'a, en revanche, pas vraiment disparu, bien au contraire. Les pubards ont juste compris qu'il valait mieux éviter de la mettre au-dessus du contenu, tu me diras, c'est déjà ça. De notre côté, on a bien sûr adopté en masse des bloqueurs de pubs comme Ublock Origins, et puis les sites ont intégré des détecteurs de bloqueurs pour nous envoyer des messages culpabilisants, etc. etc.
Ceci étant dit, ce serait assez injuste de résumer les overlays et les fenêtres modales, ces petites surcouches qui s'affichent sur une page web, à la pub. Eh non, car les webmasters rivalisent d'inventivité quand il s'agit d'enquiquiner les gens qui visitent leurs sites webs.
Par exemple, il y a quelques années de ça, j'avais reçu un mail d'une agence de com lambda qui voulait me vendre sa technologie révolutionnaire. Je t'en lis un extrait :
Savez-vous que 70 % des visiteurs qui quittent un site ne reviendront jamais ? Notre technologie vous permet de capter les adresses mails des visiteurs sortants. Grâce à notre algorithme, nous analysons le comportement du visiteur pour détecter quand il va partir, et nous collectons alors son adresse mail pour le faire revenir.
Mais ça par exemple, mais ça a l'air génial.
Bon, en fait, si je fais une traduction faux-cul-français, en gros, leur truc, ça attend que ton curseur se rapproche du haut de la page, là où y'a la croix pour fermer l'onglet, et ça t'affiche alors une fenêtre modale d'inscription à la newsletter.
Waouw. Bon, alors déjà, me présenter comme révolutionnaire une techno que je peux probablement coder après un tuto de 20 minutes sur JavaScript, c'est un peu gonflé. Mais en plus, sérieusement, est-ce qu'il y a une seule personne dans le monde que ça n'emmerde pas profondément, ce genre de truc ?
J'veux dire, de deux choses l'une : soit j'allais effectivement fermer l'onglet, et sincèrement, un truc comme ça qui me saute à la tête comme un Pokémon dans les hautes herbes, ça risque pas de me faire changer d'avis. Soit j'allais juste cliquer sur un autre onglet, ou j'avais juste bougé ma souris vers le haut, comme ça, sans raison, ben de me faire agresser par votre fenêtre moisie, ça risque au contraire de me donner envie de fermer la page et de ne plus jamais y foutre les pieds.
Je serais curieux de connaître le nombre de personnes qui laissent effectivement leur adresse mail en voyant ce genre de fenêtre leur poper à la tronche. Une vraie adresse mail, hein, pas zizi@yopmail.com
, non. Combien ne sont pas tout simplement saoulé par ces incessantes demandes d'inscription à la newsletter ? Bon, le mail de l'agence de com ne le précisait pas, donc j'en sais rien, mais je devine assez bien.
Allez, je me calme, et j'aborde un dernier overlay qui a une certaine tendance à agacer : le foutu bandeau de consentement aux cookies. Tu sais, celui où t'as le choix entre accepter, et accepter quand même ? Ou alors tu peux appuyer sur la croix, ce qui veut dire accepter aussi.
Alors tu vas me dire : ouuui, mais là les sites n'y sont pour rien, c'est la réglementation, le RGPD, tout ça, tout ça, la folie administrative, on nous met des bâtons dans les roues, de toute façon on n'aime pas les entrepreneurs dans ce pays, et puis remets-moi un canon, Roger.
Eh ben non ! Le fameux bandeau RGPD, c'est pas obligatoire. En fait, ce n'est obligatoire que si le site vous piste, avec des petits cookies et des petits traceurs. Mais ça, les sites web sont pas obligés de le faire !
Par exemple, prenons un site web au hasard… euh, tiens, celui de l'April. Oui au hasard. Ben sur le site de l'April : aucun bandeau d'acceptation des cookies ! Pareil pour le site de l'émission Libre à Vous, d'ailleurs. Et pareil si je vais sur les sites de Framasoft, de La Quadrature du Net ou de Wikipédia !
Et donc si les fameux sites qui nous collent des overlays de trois pieds de long pour nous demander si on consent à se faire espionner voulaient vraiment arrêter d'emmerder les gens, ce serait simple : arrêtez de nous pister.
Mais bon, ça c'est comme pour les pop-ups de pub, on va pas se faire trop d'illusions : on n'a pas fini de devoir développer des bloqueurs pour toutes les saletés que les entreprises du web essaient de nous refourguer. Et franchement, on assume.
Voilà, j'espère que cette première chronique vous a plu, et moi je vous retrouve très bientôt pour une nouvelle humeur ! Salut !